On assiste a une précarisation alarmante de certaines fonctions, jadis capitales, au sein de certaines entreprises. Je vous ai déjà parlé par exemple des ingénieurs, que les sociétés ne possèdent plus en propre, mais qu'elles louent, au fil de leurs besoin, à des sociétés de service.

On pourrait penser que la galère du changement de mission se termine une fois que l'ingénieur prestataire a obtenu le "Saint Graal" : une embauche définitive dans un société. Il n'en est rien car la plupart des grands groupes imposent à leurs employés de changer de fonction une fois toutes les 3 à 5 ans. Vous étiez ingénieur R&D spécialisé dans la conception de circuit électronique, vous allez devenir ingénieur avant vente chargé de faire la promotion de ces dit circuits auprès de nos clients. Certes, vous connaissez bien le produit dont vous avez participé à la conception, mais qu'en est-il de vos capacités à la vente ? Vous avez par ailleurs intérêt à remplir vos objectifs, qui consistent à améliorer le chiffre de votre prédécesseur, qui est resté lui aussi, 3 à 5 ans dans la fonction.

Mais quel est donc le bénéfice pour l'entreprise ? Certes, vous n'avez pas le temps de vous ankyloser, ni d'ailleurs, de vous épanouir. Pour "la joie par le travail", si chère à ce général japonais dans "Le pont de la rivière Kwai", on repassera. Par ailleurs, vous partez de votre service avec un certains savoir faire que votre successeur mettra inévitablement un certain temps à acquérir. Ainsi va les choses, le service en question va tourner lentement le temps que le technicien acquiert des compétences, et a peine sera t'il formé qu'on l'invitera a changer de fonction. Est-ce vraiment un modèle d'organisation viable à long terme pour l'entreprise ?

Pour l'employé, ensuite. Outre le fait de devoir changer de fonction, les cadres doivent bien souvent également changer de lieu de résidence. Un employé Renault, employé au technocentre, devra aller travailler dans un centre technique, dans une usine, en France voire en Europe. Bonjour la vie de famille si le conjoint de la personne ne peut migrer facilement dans la même région.