Justice Etats Unis

Vous avez le droit de garder le silence, tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous... Voici sans doute la phrase que toute personne a entendu dans un fil ou une série. Et pourtant, si vous vous faites arrêter en France, vous n'aurez pas droit à cette sacro-sainte phrase, qui n'existe pas dans le droit français, mais dans le droit américain.

L'affaire Strauss-Kahn a mis en lumière, dans les médias, le fonctionnement de la justice américaine. Les français, pourtant habitués à la procédure américaine pour l'avoir vu mille fois dans les films et séries, ont été abasourdis et choqués par le traitement infligé à notre ex-futur-président. Il a fallut leur expliquer, dans le détail, la différence entre les méthodes françaises et américaines. La réalité est, finalement, souvent bien plus complexe que la fiction. D'ailleurs, à écouter les témoignages de certains magistrats, beaucoup de français confondent les deux systèmes.

La différence de traitement a tout d'abord été médiatique. Alors qu'en France, la présomption d'innocence a été fortement évoqué, aux Etats-Unis, c'est plus une présomption de culpabilité qui a été évoqué. Nous avons ainsi pu voir Dominique Strauss-Kahn sortir menotté du commissariat de New York. Côté victime, par contre, calme plat : personne ne sait a quoi elle ressemble et les médias étrangers semblent s'en désintéresser. Une présumée victime française - Tristane Banon - a du coup été mise en lumière par l'affaire. Ensuite, contrairement à la France, les procès peuvent être là bas filmés. Normal, ils doivent permettre de servir d'exemple. Peu de personnes en France sont déjà entrés dans un prétoire, et savent comment les choses s'y déroulent. Pour interdire l'entrée de la vidéo dans les prétoire, on invoque en France la nécessaire sérénité des débats. C'est vrai, mais une réflexion approfondie s’impose. C'était l'argument invoqué par Albert Camus pour supprimer la peine de mort : ceux qui sont favorable à la peine de mort n'ont jamais assisté à une exécution. Les exécutions n'étant pas publiques - car trop horribles - elles ne jouaient pas pleinement leur rôle d'exemplarité. La France est troublée par le traitement que les médias adoptent vis à vis de DSK. Les médias étrangers sont, quand à eux, mal à l'aise avec le peu de respect des Français envers la victime présumée.

La différence de traitement de l'affaire se porte également sur le plan politique. Pourquoi les médias français ont, pendant des années, étouffé les signes avant coureur des dérapages de ce coureur de jupons ? Alors que dans beaucoup de pays, quand votre vie est médiatisée, il n'y a plus grande différence entre vie privée et vie publique, en France, la loi protège énormément la vie privée. Cela se traduit par exemple par une différence culturelle de point de vue dans la protection des informations privées sur Internet : les positions de Google et de Facebook sont souvent radicalement différentes de nos conceptions européennes. En France, difficile de dénoncer les agissement de tel ou tel homme politiques tant qu'ils n'ont pas été prouvés, c'est à dire jugés par un tribunal. DSK pourrait ainsi très bien attaquer Tristane Banon en diffamation.

Les incompréhensions entre les deux systèmes sont avant tout culturelles. Comme quoi, l’hégémonie américaine si souvent dénoncée ne nous a pas encore totalement atteint et qu'il existe une différence de culture certaine entre les deux côtés de l'atlantique.